vendredi 25 septembre 2009

Le voyou et la dame



    J'entre dans la voie lactée, les pneus ont bien chauffés autour des trois derniers satellites, je viens de bouffer deux caisses par l'extérieur dans la bretelle d'accélération, j'ouvre en grand, ca ondule un peu, puis entrée en hyper-espace.

Houson, houston, on a un problème! Ya HAL qui me regarde de son oeil tout rouge sur le tableau d'bord. Ah mince, miss mille est gourmande ces temps ci, encore qu'elle l'ai toujours été et il est plus probable que ce soit la faute d'un Capt'ain Solo un poil généreux sur la vitesse lumière. Alors on se calme si on veut pas finir tout grippé. C'est pas l'moment et ca me mettrait d'une humeur de cochon, un coup à la finir à la hache avec la haine, hein !?

Au fait, Spok t'es viré, je t'avais dis ya déjà 2 semaines de refaire le niveau ! C'est quand même idiot, j'ai justement pas pris l'autre parce qu'elle m'a fait le même coup hier soir. C'est ça quand on ne voyage plus, on sait plus où en est dans l'entretien des outils, j'sens que je vais me faire un week end spécial vidange de tous les vaisseaux.

Je ralentie donc, tranquillement, normalement le voyant doit s'éteindre au bout d'un moment. Bon ca tarde quand même, 3 camions bouchonnent en quinconce. Un coup à gauche, trou de souris pour le deuxième par la droite, il a déjà entamé le dépassement du suivant mais la porte spatio temporelle n'est pas encore fermée, zip, d'un bon coup de gaz je me faufille entre les deux montagnes d'acier. Je suis Indiana roulant boulant in-extremis sous une porte de temple, Nemo qui se sauve des méduses, le milliard de spermatozoides qui s'epprennent de libertés suite à une poignée bien essorée... Oula je m'égare.

Toujours sous pression, je replonge vers 120, l'oeil rivé sur le voyant, position d'attente un coude sur le réservoir. Pas encore aujourd'hui que je serai en avance sur l'horloge atomique du pointage. Je passe une banalisée qui était prête à homologuer la sortie de la Black Fazer de son orbite terrestre. Bon ok, merci Spok, tu peux revenir, comment j'pouvais savoir moi? Oui oui je retire tout ce que j'ai pu dire sur le peuple Klingon, et bonjour au Judge Dredd qui doit attendre plus loin.

Sur ce j'arrive à la hutte pour laisser mon obole, observe de loin Jabba et ses acolytes en souriant. C'est pas encore pour aujourd'hui que vous m'prendrez la falcon millénium les gars ! Dans la file parallèle, une pas toute jeune mais belle princesse Leïa m'interpelle. Son joli regard tout ridé n'est que sagesse, douceur, elle baisse sa vitre, sans doute va-t-elle me demander l'adresse d'une quelconque galaxie...

   - "Bonjour jeune homme, je vous ai vu passer entre les 2 camions, c'est dangereux vous savez, il ne faut plus faire ça, un jour vous vous tuerez".

Mon statut de pirate intergallactique en blouson noir voudrait d'instinct lui répondre d'aller voir si les tankers de l'espace sont mieux gardés sur Uranus. Je me ravise, elle ne m'a pas agressé, et parait si gentille. Je réprime également un hypocrite haussement d'épaule. Sous entendre que je ne tiens pas à la vie alors qu'il fait beau, que le Vercors est magnifique, et que les brêles me font toujours autant bander quand je pose le cul dessus (tout comme les jolies princesses d'ailleurs), ce ne serait pas très honnête. Mais alors que répondre? Qu'il y avait 3 années lumières pour passer? Que je m'excuse de lui avoir probablement fait peur, mais que je n'ai pris aucun risque dans cette manœuvre avant tout rigolote?

J'hésite et finalement ne trouve pas. Il faudrait qu'on en parle autour d'une tasse de café, et encore, peut-être ne comprendrait elle toujours pas. Il y a t'il quelque chose à comprendre dans cet attachement viscéral aux sensations que procure la moto? Je remonte mon écran fumé et plonge mes yeux dans les siens en souriant. Je tente de mettre dans mon regard autant de douceur qu'il y en a dans le sien, façon de dire "non je ne suis pas qu'une brute inconsciente".

On quitte le péage en même temps. Le voyou qui m'habite bouillonne de partir en trombe, passer tout le monde sur la roue arrière, born to be wild, tout ça. Je ne le ferai pas. D'abord parce qu'elle ne mérite pas cet affront, ensuite parce que je suis toujours en manque d'huile. Rapidement éloigné, je reprend mon rythme habituel, sans plus, et me contenterai donc de mes 300 infractions au code de la route par kilomètre, la routine quoi.

Belet SkyRunner

1 commentaire:

  1. De la realité à l'imaginaire il n'y a qu'un pas!!
    Belle demonstation avec ce billet.
    Super recit... :) :)

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